mercredi 7 mai 2008

Les pesticides omniprésents dans l'alimentation, en France

LE MONDE 07.05.08
L'importance de l'exposition aux pesticides, notamment par voie alimentaire, est mise en évidence par deux études. La première, réalisée par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et publiée fin avril, montre que 6 % des fruits et légumes testés présentaient des teneurs en pesticides dépassant la limite maximale de résidus (LMR). La seconde, présentée mercredi 7 mai par l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris), conclut que "les enfants franciliens sont exposés à des pesticides variés, dont certains interdits depuis plusieurs années, alors que leurs parents ne sont pas professionnellement exposés".Sur les 3 500 échantillons de fruits et légumes prélevés en 2006 par la DGCCRF, 55,6 % ne contenaient pas de résidus de pesticides. Des teneurs inférieures à la LMR ont été détectées dans 38,4 % de ces échantillons.Mais, pour les légumes, 6,3 % des échantillons sont non conformes, car excédant la LMR. "Les dépassements concernent essentiellement les poivrons et piments, les lentilles et les aubergines", précise la DGCCRF, qui indique que "les salades, les pommes de terre, les endives, les carottes et les tomates ont un taux de dépassement de la LMR inférieur à la moyenne".Les pesticides sont plus fortement présents dans les fruits : 58,6 % des échantillons comportaient des résidus à des teneurs inférieures au maximum autorisé et 5,5 % étaient non conformes. "Les dépassements concernent essentiellement les fraises, les mandarines, les poires. Les oranges, les avocats et les pommes ont un taux de dépassement de la LMR inférieur à la moyenne", note la DGCCRF.Le pourcentage de non-conformité a très légèrement diminué par rapport à l'année précédente, passant de 6,7 % à 6 %, mais les données de l'année 2004 indiquaient un taux de 3,9 %. Pour François Veillerette, président du Mouvement pour les droits et le respect des générations futures (MDRGF), ces chiffres "montrent l'urgence de mettre en application la mesure de réduction de l'usage des pesticides prise dans le cadre du Grenelle".L'étude de l'Ineris, réalisée avec l'université Paris-V, a évalué l'exposition aux pesticides de 130 enfants répartis dans l'Ile-de-France, 73 vivant en pavillon et 57 en appartement. Un total de 31 composés (insecticides, herbicides et fongicides) a été pris en compte et les prélèvements ont été effectués dans l'air, sur les poussières au sol et sur les mains des enfants. Les produits du métabolisme des insecticides ont été recherchés dans les urines.Au moins un produit de type pesticide se trouvait dans 94 % des logements : insecticide dans 93 % des cas, fongicide pour les plantes dans 30 % des cas et herbicide dans 32 %. Le lindane, un insecticide désormais interdit en France, était le pesticide le plus fréquemment retrouvé dans l'air (88 % des logements).Le fait le plus marquant porte sur les pesticides organophosphorés : 70 % des enfants excrétaient au moins l'un des six métabolites urinaires des organophosphorés, alors que ceux-ci étaient détectés moins fréquemment dans l'environnement intérieur."Cela peut signifier qu'il existe une autre source d'exposition que celles que nous avons recherchées. Cela pourrait être la voie alimentaire, indique Olivier Blanchard, responsable de l'étude. Des prélèvements alimentaires seraient donc indispensables pour passer au stade des certitudes sur la voie alimentaire d'exposition aux pesticides." Paul Benkimoun Le Monde

jeudi 1 mai 2008

200 000 personnes sont, chaque année, victimes d'une intoxication en France

Une étude nationale des centres antipoison donne une première approche d'un phénomène qui touche en majorité les enfants âgés de 1 à 4 ansLe phénomène des intoxications fait, pour la première fois en France, l'objet d'une analyse détaillée. Publiée dans La Revue du praticien du 30 avril, cette étude épidémiologique est le fruit de la récente création d'un système d'information commun aux dix centres antipoison et de toxicovigilance (CAPTV) animé par l'Institut de veille sanitaire.Au cours de l'année 2006, les CAPTV ont recensé 197 042 cas d'exposition à des produits toxiques. Elles ont été accidentelles pour 82,5 % d'entre elles et volontaires dans 15,7 % des cas, les circonstances n'étant pas connues dans 1,8 % des cas." Les intoxications aiguës sont une cause fréquente d'admission dans les services d'urgence et de réanimation. La mortalité reste non négligeable et incompressible pour certaines d'entre elles, malgré une prise en charge qui paraît optimale ", résume le professeur Frédéric J. Baud (réanimation médicale et toxicologique, hôpital Lariboisière, Paris).L'analyse détaillée coordonnée par un groupe de spécialistes dirigés par le docteur Antoine Villa (Centre antipoison de Paris, hôpital Fernand-Widal) porte sur 130 463 cas d'intoxications recensés dans sept CAPTV français pour lesquels l'ensemble des données d'activité de l'année 2006 était disponible. Il apparaît que plus de la moitié (108 000) des cas d'intoxications accidentelles concernent des enfants âgés de 1 à 4 ans. Ces intoxications aiguës surviennent au domicile quand des produits toxiques sont laissés à leur portée.Les intoxications accidentelles sont, d'autre part, dues à des erreurs médicales dans 10,5 % des cas, à des accidents professionnels (5 %) ainsi qu'à des accidents thérapeutiques sans faute médicale (2,1 %). Les produits les plus fréquemment identifiés sont les spécialités pharmaceutiques, les produits domestiques ménagers, les substances chimiques, les produits à usage professionnel, les plantes et les produits cosmétiques.Les auteurs analysent d'autre part les dossiers médicaux de plus de 18 000 personnes qui se sont volontairement intoxiquées durant l'année 2006. Dans 80 % des cas, leur âge est compris entre 10 et 49 ans et les femmes sont plus nombreuses que les hommes (62,4 % contre 37,6 %). Il s'agit presque toujours d'une conduite suicidaire (92,6 %). Mais il faut aussi compter avec les actes criminels ou de malveillance (3,9 %) et les toxicomanies (3,4 %).Le médicament le plus fréquemment utilisé est le paracétamol, principe actif qui est contenu dans les trois spécialités les plus vendues en pharmacie en 2006. Viennent ensuite les anxiolytiques (Bromazépam, Xanax, Méprobamate, Lysanxia) et un hypnotique (Stilnox). Plusieurs substances sont souvent associées.Cette étude recense au total 214 cas d'intoxications mortelles survenues chez les personnes qui ont été prises en charge par les CAPTV. Il s'agit une fois sur trois d'intoxications accidentelles (souvent dues au monoxyde de carbone) et, pour le reste, d'intoxications volontaires. " Ces résultats sont riches d'enseignements, mais ils sont encore imparfaits, estime le professeur Baud. Seul le développement de réseaux réunissant centres antipoisons, centres "15", services d'urgence et de réanimations permettra de donner une image de l'ampleur du problème des intoxications aiguës en France. " Jean-Yves NauLe Monde