lundi 4 décembre 2006

L’exposition aux dioxines reliée au risque de cancers

Le 30 novembre, l’Institut de veille sanitaire (InVS) a présenté les résultats de deux études épidémiologiques sur les dioxines émises par les unités d’incinération d’ordures ménagères (UIOM). Détectées dans des œufs pondus à Besançon (Doubs) ou dans du lait de vache trait à Gilly-sur-Isère (Savoie), les dioxines ont beaucoup fait parler d’elles les dernières années. L’InVS s’est donc penché sur la relation entre l’exposition à ces substances toxiques et la santé. «Ça n’est pas la distance par rapport à l’incinérateur qui compte, mais l’exposition au panache», a souligné Gilles Brücker, directeur de l’InVS.
L’étude «Imprégnation par les dioxines des personnes vivant autour d’incinérateurs d’ordures ménagères en France», co-pilotée avec l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa), a été réalisée sur environ 1.000 personnes vivant à proximité de 8 incinérateurs. Elle montre qu’il n’y a globalement pas de différence d’imprégnation, c’est-à-dire de concentration en dioxines dans le sang, entre des personnes habitant dans les zones exposées à un panache de dioxines et celles qui vivent à au moins 20 kilomètres d’une UIOM. Mais il apparaît que la consommation de produits locaux d’origine animale dans la zone d’un panache influence l’imprégnation. Ce résultat ne concerne que les usines anciennes, et non les nouvelles usines soumises à réglementation .
La seconde étude, intitulée «Incidence des cancers à proximité des usines d’incinération d’ordures ménagères», concerne l’apparition de cancers durant la période 1990-1999 auprès de populations ayant vécu à côté ou non d’une UIOM. Elle montre qu’il existe un lien significatif entre le lieu de résidence sous un panache d’incinérateur de 1972 à 1985 et l’augmentation du risque de certains cancers. Chez les femmes, une augmentation de risque a été observée pour tous les types de cancers. Chez les deux sexes, une augmentation de risque a été enregistrée pour le cancer du foie et les lymphomes non hodgkiniens.
Les auteurs de l’étude ont toutefois souligné qu’aucun lien de causalité directe n’a été établi dans les relations mises en évidence. D’autres éléments comme les fumées générées lors d’incendies ou par les feux de broussailles faits chez les particuliers contribuent par exemple à l’exposition aux dioxines. Il n’en reste pas moins que la France possède le plus grand parc d’installations d’incinération ménagère en Europe. Dominique Voynet, élue des Verts, a d’ailleurs confirmé sa demande de moratoire immédiat sur la construction de nouveaux incinérateurs et un plan de fermeture des installations existantes. Elle indique également qu’une manifestation doit avoir lieu le 2 décembre à Corte en Corse contre «un projet d'incinérateur surdimensionné, encore une fois au mépris de l'avis des populations concernées».
Au contraire, estime Nelly Olin, ministre en charge de l’environnement, «ces résultats confortent l’action engagée» par le ministère concernant «le respect des nouvelles normes environnementales en vigueur, plus strictes.» Et de rappeler que les rejets de dioxines des UIOM, qui avaient déjà été divisés par 10 entre 1995 et 2005, ont une nouvelle fois été diminués d’un facteur 10 en 2006.
Toutefois, même si la réglementation a progressé et le nombre d’installations est passé de 300 en 1998 à 128 aujourd’hui, les conséquences d’une exposition n'apparaissent que des décennies plus tard. Il faudra donc attendre de nombreuses années avant de savoir si la mise en conformité récente des installations permet de diminuer le risque d’apparition de cancers.
Agnès Ginestet, JDLE. 04 12 06
Voir le dossier de l’INVS : http://mdrgf.c.topica.com/maafp0Kabu8wzbee6JsbafpL0Q/

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