jeudi 15 décembre 2005

"Pesticides, agriculture, environnement : réduire les utilisations, limiter les impacts"

Un rapport de l'INRA confirme la nécésité de réduire l'usage des pesticides.

Colloque de restitution INRA sur le rapport d'expertise « réduire l'utilisation des pesticides et en limiter les impacts environnementaux »15 décembre 2005 à Paris.
Une expertise scientifique collective menée par l'Inra et le Cemagref, à la demande des ministères en charge de l'agriculture et de l'environnement, a permis de dresser un état des lieux des connaissances sur lesquelles pourraient se fonder des actions visant à réduire le niveau actuel d'utilisation des pesticides et leurs impacts environnementaux.Elle étudie également les conditions économiques qui renforcent actuellement la dépendance des systèmes de production vis-à-vis des pesticides, et la nécessité de mettre en place une politique volontariste si la société souhaite une réduction significative de l'emploi des pesticides sur l'ensemble du territoire et une protection particulière des zones les plus sensibles aux contaminations. rapport téléchargeable en cliquant sur le lien ci dessous :
http://www.inra.fr/expertise-pesticides
renseignements sur le colloque de restitution et inscriptions à : ALTAMEDIA5, rue de Milan 75009 Paris Tél.: 01 44 91 58 50 Fax : 01 44 91 58 51
François VEILLERETTE participera à ce colloque de restitution pour le MDRGF. Il a été pressenti pour participer à une table ronde.Voici un extrait de sa contribution aux débats :
La réduction de l'utilisation des pesticides, une nécessité.
Notre agriculture est extrêmement dépendante de l'utilisation de quantités très importantes de produits phytosanitaires. En effet, selon Eurostat, la consommation de produits phytosanitaires a régulièrement augmenté dans l'Union Européenne ces dernières années. En France, après avoir atteint des sommets de consommation il y a quelques années, les tonnages utilisés ont très légèrement diminués mais la fréquence des traitements sur grandes cultures continue d’augmenter . Ce sont ainsi jusqu’à 9 traitements différents qui sont utilisés sur la culture du blé, alors que les pommes reçoivent, elles, en moyenne 27 traitements par an !Cette dépendance à une utilisation importante des pesticides laisse des traces, dans notre environnement, dans notre alimentation et dans organismes :- 90% des cours d’eau et près de 60% des nappes phréatiques françaises contiennent maintenant des résidus de pesticides .- L’air et les eaux de pluie en contiennent à des concentrations parfois plusieurs dizaines de fois supérieures aux concentrations admissibles pour l’eau du robinet .- Plus de la moitié des fruits et légumes contiennent des résidus de pesticides et 7% des échantillons dépassent les Limites Maximales en Résidus (LMR) .- Etc
La conséquence de cette omniprésence de résidus est que, fort logiquement, on retrouve dans nos organismes, à côté d’une foule d’autres polluants, de nombreux pesticides, certains anciens et persistants, mais aussi d’autres de faible persistance et apportés là par une exposition constante et régulière. Les adultes sont contaminés, mais aussi les enfants, et, plus grave encore, ces êtres fragiles en formation que sont les foetus n'échappent pas à la règle et sont contaminés in utéro . Les nourrissons le sont, eux, par l'allaitement maternel La synthèse du rapport d'expertise de l’INRA/Cemagref reconnaît que « les risques pour la santé humaine (des pesticides) apparaissent suffisamment plausibles pour être mentionnés dans tous les rapports et le plan Santé-Environnement et pour justifier le lancement d’études épidémiologiques et la commande d'une expertise à l’INSERM. » En fait, il existe une accumulation des données préoccupantes fournies par la littérature épidémiologique internationale sur le lien entre l’exposition occupationnelle ou environnementale aux pesticides et l'existence de risques significativement accrus et parfois de manière importante- de développer de multiples pathologies. Une littérature maintenant très importante nous montre en effet que de nombreux types de cancers, des problèmes d'infertilité, des malformations congénitales, des troubles neurologiques,ont été observés plus fréquemment chez les populations exposées aux pesticides que chez celles qui ne le sont pas. La Commission Européenne elle même, dans son 6° Programme d’action pour l'environnement, a reconnu qu'il y a « des preuves suffisantes pour suggérer que les problèmes associés à la contamination de l'environnement et des aliments par les pesticides sont sérieux et s'aggravent ».Face à l’augmentation de ces pollutions environnementales et au risque de pathologies induites, le bon sens voudrait donc que l'on limite réellement l'exposition de la population en réduisant l'emploi des pesticides en agriculture, et non en essayant simplement d'en limiter la dispersion dans l'environnement ou d'en raisonner l’emploi.C'est ce bon sens que le 5° Plan d’Action pour l'Environnement de l'Union Européenne avait choisi de promouvoir lorsque qu'il préconisait la « mise en oeuvre d'une politique de réduction de l'utilisation des pesticides » en Europe. C'est ce même bon sens que le Parlement Européen avait mis en avant en 2002 dans le Rapport Lannoye, du nom de son rapporteur, qui demandait l'adoption d’une Directive pour la réduction de l'utilisation des pesticides en Europe. Aujourd’hui, la synthèse du rapport d'expertise de l'INRA/Cemagref reconnaît l'existence des risques liés à l'utilisation intensives des pesticides de synthèse : risques pour l’environnement et la santé humaine, mais aussi risques pour l'agriculture conventionnelle elle même avec, par exemple, l'apparition de problèmes de résistance qui concernent la plupart des familles chimiques de pesticides. Elle met surtout en avant « la nécessité de réduire les utilisations de pesticides pour en limiter les impacts ». Je ne peux que me féliciter de ce langage, nouveau et porteur de l'espoir d'une évolution enfin possible, même si le rapport se refuse à fixer de quelconques objectifs de réduction chiffrés. Je me félicite également de lire que cette même synthèse met en avant des solutions réellement efficaces sous forme de « stratégies alternatives » au premiers rangs desquelles la production intégrée et l’agriculture biologique, que nous préconisons depuis longtemps..... ...Les politiques de réduction importantes de l'utilisation des pesticides sont indispensables à une amélioration rapide de la situation environnementale et sanitaire. Nous savons maintenant qu'elles sont possibles, efficaces et compatibles avec une production agricole suffisante et économiquement viable pour les pays européens. Il est donc urgent de les mettre en oeuvre rapidement, dans l'intérêt de tous, et notamment des franges de la population les plus fragiles ou les plus exposées . Il faut donc maintenant que les responsables en charge du dossier fassent preuve d'une réelle volonté politique pour que les conclusions de ce rapport INRA/Cemagref ne restent pas lettre morte et intégrent dans leurs politiques l'objectif de réduction de l'utilisation des pesticides. Comme le dit si bien une conclusion du rapport d'expertise de l’INRA/Cemagref, l'engagement dans une politique de réduction de l'utilisation des pesticides « doit être marqué rapidement par un signal fort ». C'est ce signal politique fort que les associations comme le MDRGF attendent aujourd'hui.

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